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Une évolution collective prévisible

Tout le monde connait les grands principes de la retraite par répartition. Les actifs consentent à abandonner une partie des revenus de leur activité pour que les retraités puissent percevoir une pension. En contrepartie ils espèrent qu’à leur tour ils percevront une pension des générations suivantes.

Sur le plan collectif la communauté est contrainte de respecter un équilibre global de long terme. Les sommes reçues globalement par les retraités ne peuvent provenir que de sommes prélevées aux actifs (que ce soit sous forme de cotisations, de taxes ou même d’impôts). Les « excédents » ou les « déficits » du régime de retraite peuvent sur des durées temporaires permettre de lisser les fluctuations de la conjoncture mais au final le niveau des retraites et l’âge moyen de fin d’activité dépendront de la croissance économique du pays et de sa démographie.

On peut donc assez bien prévoir le niveau moyen des retraites futures…mais pas le choisir. Quels que soient les choix politiques le niveau relatif des pensions par rapport aux salaires est promis en moyenne à baisse sensible, de l’ordre de 25%, sur les 40 prochaines années.

Un système complexe qui reflète des choix politiques parfois contradictoires

La collectivité peut faire en revanche des choix politiques, qui structurent le fonctionnement du système de répartition, et sont l’objet d’âpres débats publics.

Ainsi le système actuel conjugue trois grandes tendances :

  • Une logique catégorielle (par profession ou statut), héritée du temps où c’est à ce niveau que se gérait la solidarité entre actifs et retraités, et où la société supportait de très grandes disparités entre les retraites de différentes professions. Remise en cause par la rapidité de l’évolution des carrières et métiers comparée au temps long des retraites, cette logique catégorielle débouche sur une intervention croissante de l’Etat, ponctionnant les uns pour sauver les autres (la caisse des « marins pécheurs » et celle des « mineurs de fonds » couvrent moins de 20% de leurs besoins). L’évolution vers une retraite « universelle », largement réalisée pour les salariés du privé, était au cœur de la réforme des retraites de 2019 aujourd’hui mise en pause, et la transition sera longue.
  • Des mécanismes de redistribution puissants tant dans la phase de cotisation (ex : validation de points pour les chômeurs) que dans la phase de pension (ex : minimum de retraite), qui sont d’autant mieux acceptés que chacun comprend que dans le futur « l’autre » pourrait être un jour lui-même. Ce choix redistributif, va sans doute se pérenniser voire s’accentuer dans une société en quête d’équité et de paix sociale. Elle a pour conséquence une forte décote sur les retraites des actifs les mieux rémunérés.
  • Un calcul de droits individuels, indispensable mais en partie trompeur pour faire le lien entre la contribution d’un individu durant sa carrière et sa future pension. Indispensable pour que chacun consente à cotiser pour « sa » retraite, et pour qu’il puisse prévoir les ressources sur lesquelles il pourra compter, et le cas échéant les actions pour les compléter.  Mais en partie trompeur car les « droits » que l’on accumule ne sont en rien garantis. Ils dépendront in fine de l’évolution économique, de la solidarité et des règles de redistribution : c’est-à-dire des autres. D’où une forte crispation de tous ceux qui voudraient cumuler le maintien de garanties individuelles dans un régime catégoriel, préemptant par avance une part de la solidarité future à leur profit.

Des règles du jeu enchevêtrées, mais un effort de transparence

Les règles du jeu qui déterminent le calcul des droits à la retraite, et leur valorisation, ne peuvent être simples. A l’opposé du « 1 euro cotisé donnera le même droit à chacun » d’un régime universel par point le régime actuel superpose des règles pour chaque régime, des règles destinées à redistribuer transversalement aux régimes, et des règles ayant pour vocation de piloter l’équilibre général tous régimes confondus. Ces règles sont toutefois assez clairement formulées, présentées de manière transparente, et font l’objet d’un important travail d’information. Il est donc possible de s’atteler à la tâche. C’est-à-dire d’abord comprendre ses droits en constitution, prévoir ce qu’ils apporteront dans le futur, et prendre les décisions dans les moments importants.

Comprendre, prévoir, décider.

Comprendre c’est-à-dire s’intéresser :

  • Au montant de ses droits en cours d’acquisition. C’est aujourd’hui facile car tout actif peut y accéder à tout moment par la consultation de son RIS (relevé individuel de situation, ou relevé de carrière). Ce RIS est disponible en créant simplement un compte sur le site de l’Assurance Retraite avec son numéro d’assuré social. Il permet aussi de vérifier si des périodes d’activité ou de cotisation ont été oubliés.
  • Aux règles qui déterminent l’acquisition de ses droits, passés ou futur. Ces règles suivent une logique différente pour la constitution de sa retraite « de base » et de sa retraite « complémentaire » et il faut donc comprendre chacune de ces logiques puis le combiner.

La tâche reste toutefois accessible (*) d’autant qu’elle consiste en fait à clarifier des concepts connus de tous (« trimestres » « points » etc..). Nombreux sont les sites qui les présentent, de manière plus ou moins précise. Certains proposent aussi de répondre aux questions comme le site « les experts retraite » opéré par l’AGIRC-ARRCO qui fournit une réponse personnalisée gratuite sous 48h.

(*) Elle devient plus ardue pour ceux dont la carrière a connu des « régimes » différents (salarié du privé, fonctionnaire, indépendant, expatrié…).

Prévoir c’est-à-dire appréhender :

  • Le montant futur de retraite auquel sa carrière donnera droit, en faisant la part des incertitudes personnelles mais aussi de celles induites par l’évolution des régimes. C’est ce à quoi servent de très nombreux « simulateurs » ou « bilans retraite » présents par exemple sur tous les sites bancaires. Pour des salariés loin de l’âge de la retraite, ces simulations permettent de se fixer un ordre de grandeur ce qui est le plus important. Pour ceux qui ont dépassé 50 ans, une simulation personnalisée basée sur leur relevé de carrière peut permettre de les affiner. Le site de l’AGIRC / ARRCO, mais aussi des services privés proposent de telles simulations. Elles ne sont pas pour autant une prévision exacte de ce qui se passera : il faut s’attacher à bien comprendre leurs limites et leurs hypothèses.   
  • Le besoin de complément dont on pourrait avoir besoin au moment de la retraite. Par exemple en appréhendant son changement de cadre de vie,  son futur budget de consommation, ou l’évolution de son imposition et en comparant ses futurs besoins à ses futures ressources. Là aussi la prévision n’est pas l’art des calculs exacts. Il s’agit plutôt de se fixer de bons ordres de grandeurs (« il me manquera 10% de revenus » ou « 300 € par mois »), appuyés sur des raisonnements simples. Et  c’est sans doute la personne concernée qui est la mieux à même de les réaliser.

Décider c’est-à-dire choisir de manière éclairée :

  • Plusieurs années voire dizaines d’années à l’avance pour affecter une capacité d’épargne en vue de constituer un complément de revenus, et donc à un moment où les prévisions seront encore très incertaines. L’épargne retraite est à ce titre une « épargne de précaution » mais dans une logique de long terme.
  • Dans les moments où des tournants professionnels se présentent (changement de métier, d’entreprise, de statut..) en prenant en compte leurs impacts sur la retraite
  • A l’approche de son départ quand il s’agit de fixer une date et des modalités de départ et d’en estimer les conséquences sur un niveau de pension versé en moyenne durant 25 ans.

Patience et méthode

De la même manière que l’éducation financière fait défaut aux français, les principes des régimes de retraite ne sont jamais enseignés comme si l’Etat « s’occupait de tout » et qu’il ne servait à rien d’être proactif. Ce qui n’était pas loin d’être vrai pour une majorité des retraités d’aujourd’hui.
On a vu qu’il n’en était rien pour ceux qui sont au début de leur vie active, mais heureusement le temps est un allié précieux si on sait l’utiliser avec patience et méthode pour s’intéresser, apprendre et devenir peu à peu un acteur conscient de la préparation de sa retraite.   

Auteur : Nicolas Schimel 

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Post Author: Le Blog de la Téléconsultation Financière

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